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QUELQUES REFLEXIONS SUR L’ETOILE ET LE POING de Pierre Lurçat.
INTRODUCTION
Pierre Lurçat a publié, il y a quelques semaines, un ouvrage consacré aux groupes juifs d’autodéfense en France : L’Etoile et le poing. Ce livre présente au moins trois atouts majeurs qui en font une lecture extrêmement intéressante. Premièrement, P. Lurçat, grâce à sa hauteur de vues, est en mesure de déployer un panorama complexe et critique de l’activisme. Mais il fait aussi la démonstration de ses capacités d’analyse lucide et perspicace, où perce quelquefois l’ironie et l’autodérision sans que celle-ci jamais n’entame le sacré des convictions. Deuxièmement, l’auteur nous plonge de manière inédite dans une perspective interne aux mouvements dont il a côtoyé la plupart des militants en sa qualité de cadre actif du Tagar. Troisièmement, jamais il n’est pris en défaut de mentir ou d’enjoliver, de dissimuler ou de travestir — Pierre Lurçat, visiblement, ne connaît pas la langue de bois.
Ce qui, dans le livre de Pierre Lurçat, retient le plus mon attention, c’est évidemment ce qui touche aux événements politiques de la France. Si je connais très mal, et pour cause, les ressorts de l’activisme juif que Pierre Lurçat met au jour, en revanche, je crois assez bien connaître la pensée de de Gaulle, assez bien comprendre ce que représente Mai 68 et m’être assez intéressé aux manipulations de Mitterrand et de sa petite franc-maçonnerie de vétérans du pétainisme pour être réceptif aux propos tenus dans le livre, par exemple concernant la FANE ou la prise de conscience de la véritable nature du président socialiste à l’occasion de l’affaire Bousquet. Les souvenirs de Pierre Lurçat, naturellement, font remonter les miens à la surface. Ainsi, je me rappelle vivement comment je m’étais retrouvé au milieu des années 1990 face à Max Gallo, très remonté contre lui, et prêt à une polémique violente. Je ne m’attendais pas à cet effondrement instantané du vieil historiographe devant un jeune homme inconnu, et à sa confession timide, presque honteuse qui jurait avec ses gesticulations de matamore sur les plateaux de télévision: “Oui, vous avez raison, Mitterrand a restauré Vichy à la tête de l’Etat”!
L’Etoile et le poing montre la genèse des mouvements d’autodéfense juifs à partir de 1967, à la faveur surtout de Mai 68 qui, loin d’être un événement “orchestré par les Juifs” comme les antisémites les plus bas de plafond le prétendent, créa un contexte dangereux où les facultés s’étaient transformées en virulents foyers d’activisme anti-israélien, tandis que d’anciens collabos philonazis de haut rang, naturellement très anti-gaullistes, poussaient devant eux des agitateurs manipulables comme Cohn-Bendit. La droite gaulliste, du reste, n’a jamais vu les choses autrement: j’ai eu l’occasion d’entendre il y a très longtemps William Abitbol le confirmer devant moi. Pour William, qui était le dépositaire de renseignements classés secret-défense dont nous n’avions évidemment pas connaissance, la réalité, c’était que quelques Juifs peu lucides mais amateurs de “chienlit” et avides de se faire remarquer s’étaient laissé manipuler par des revanchards pétainistes qui — main dans la main avec les Américains — trouvaient enfin là l’occasion de précipiter à bas de son piédestal l’homme providentiel qui avait sauvé la France du déshonneur absolu et l’avait restaurée dans sa grandeur. Cette opinion est aujourd’hui partagée par des personnalités aussi différentes que l’historienne marxiste Annie Lacroix-Riz ou l’écrivain Morgan Sportès. Elle rejoint les observations de Pierre Lurçat et les témoignages qu’il a recueillis dans L’Etoile et le poing.
1. MAI 68 ETAIT ANTI-ISRAELIEN.
La formule “Post hoc, ergo propter hoc” — “après cela, donc à cause de cela” — passait chez les philosophes de l’Antiquité pour le sophisme type. Ce n’est pas parce que deux événements se succèdent dans le temps qu’il existe nécessairement entre eux une relation de cause à effet. Sans doute, la guerre des Six Jours qui s’est déroulée au cours de la deuxième semaine de juin 1967 est liée au développement des mouvements d’autodéfense des étudiants juifs, mais de façon très différente de ce qu’on pense habituellement dans les milieux teintés — consciemment ou non — d’antisémitisme borné. Laissons la parole à Pierre Lurçat:
Pour comprendre le contexte de la création du Front des Etudiants Juifs, il faut s’arrêter un instant sur la période cruciale de l’après-Guerre des Six jours, qui est aussi celle qui précède les événements de mai 68. A de nombreux égards, les années 1967–1968 sont une période charnière pour le militantisme juif, et pour l’histoire récente des Juifs en France. Beaucoup a été dit sur l’implication juive dans les événements de 1968, et très peu sur le militantisme juif à proprement parler. Celui-ci est étroitement lié à la guerre des Six Jours, avant et au cours de laquelle l’État juif se trouve, pour la première fois depuis 1948, menacé de destruction physique par ses voisins arabes. Le sentiment d’angoisse et d’inquiétude profonde ressenti pendant les premiers jours de la guerre est un facteur essentiel de l’essor du militantisme activiste en France après 1967.
Seulement, cette implication n’est pas celle qu’on croit:
Meir Weintrater, qui fut cofondateur du CLESS (Comité de Liaison des Etudiants sionistes socialistes), décrivait ainsi, dans le magazine L’Arche de novembre-décembre 1969, l’atmosphère anti-israélienne sur les campus français en mai 68 : “Ces événements, que les journaux arabes dénoncèrent alors comme un “complot sioniste” furent en fait la grande chance de la propagande anti-israélienne. Les étudiants arabes, qui depuis la guerre d’Algérie accomplissaient un patient travail de pénétration dans le mouvement étudiant français, se mêlèrent à l’insurrection. On les trouva dans la cour de la Sorbonne, sous le slogan “El Fath vaincra”. Ainsi débutait la nouvelle phase de la campagne anti- israélienne en France… Dans les halls des facultés, des banderoles proclamaient “Vietnam Palestine, même combat!”
André P., dessinateur connu dans la mouvance juive activiste sous le nom de plume de Réguel, a aussi vécu les événements de Mai 68. A l’époque André P. était le chef du service d’ordre étudiant à la Sorbonne. L’histoire de son entrée dans le mouvement d’autodéfense peu de temps après est tout à fait significative. Il raconte:
J’étais allé voir un film israélien à la Cité universitaire, et des maoïstes ou des trotskystes se sont mis à frapper les gens dans l’assistance… J’ai pris une chaise et me suis défendu, mais j’ai compris que je ne pouvais pas faire grand-chose tout seul! J’ai alors rejoint le Bné-Zeev [1].
Et André P. d’ajouter, à l’attention des rares personnes qui l’ignoreraient encore:
C’est Prouvost, le pétainiste condamné pour collaboration, qui a lancé Cohn-Bendit! A la Sorbonne, il y avait alors les fameux ‘Katangais’, espèce de mercenaires avec qui j’étais en liaison. Un jour, les propalestiniens étaient en bas dans la cour, sur leur stand, j’ai envoyé les Katangais pour les ‘nettoyer’!
Ces “Katangais”, qui formaient des bandes hétéroclites sans aucun rapport avec le Katanga, avaient comme seul point commun de n’être pas étudiants. On y comptait naturellement des anciens de l’OAS et surtout des blousons noirs venus de la proche et lointaine banlieue, mais Jean-Pierre Le Goff rappelle qu’il y avait aussi parmi eux des Juifs de Belleville encadrés par des vétérans de la guerre des Six Jours (Mai 68, L’Héritage impossible). Cette fraction spécifique des “Katangais” ne semble pas avoir été mêlée aux casseurs, mais s’être consacrée à la défense des Juifs piégés au plus fort de la “chienlit”. C’est à eux, sans doute, qu’André P. fait ici allusion.
Quant au soutien logistique généreusement offert à Cohn-Bendit, Morgan Sportès a décrit tout cela, il y a longtemps déjà, avec l’âcreté corrosive qui est sa marque de fabrique et ce style nerveux qui n’appartient qu’à lui: Mai 68 fut l’occasion pour le ban et l’arrière-ban du vichysme et de l’OAS de s’agiter fébrilement. C’est pour délibérément aggraver le chaos que l’ancien collabo Jean Prouvost [2] y véhicule partout Cohn-Bendit avec la DS de Paris-Match, tandis que Mitterrand, dont la ferveur maréchaliste n’a jamais diminué, gesticule dans les halls de gare pour qu’on l’élise président à la place du président. Pendant ce temps, Jacques Laurent, le neveu d’Eugène Deloncle (fondateur de la Cagoule), qui s’est momentanément éloigné de Paris pour tourner un film pornographique en Berry, est partagé entre la jubilation et la rage de ne pouvoir assister à l’éclatement de la France gaullienne. L’ex-chef de service — jusqu’en 1944 — du secrétariat général à l’Information (la propagande de Vichy) est, comme Bousquet et les autres, un ami de Mitterrand et un antigaulliste virulent.
Enfin, comment ne pas trouver surprenant qu’on retienne sélectivement la “judéité” bien commode — quoique totalement superficielle — de certains fauteurs ou exploiteurs de désordre quand on oublie, tout aussi commodément, par exemple qu’en mai 68 l’organisateur du comité de grève et agitateur en chef de Sciences Po n’est autre que Hubert Védrine, le fils de Jean Védrine, “resté très maréchaliste comme Mitterrand” [3], titulaire de la francisque numéro 2172, et membre de la Cagoule selon les archives de la Préfecture de police (PJ52, CSAR) [4]? Ce même Hubert Védrine qui sera mêlé aux affaires de Nicholas Glencross, le curé pédocriminel importé de la Creuse par Jean Védrine et placé par lui sous la protection de Mitterrand, député de la Nièvre, dès 1947? Glencross est lui-même très lié aux réseaux néofascistes italiens et en affaires serrées avec le pédocriminel néo-nazi Miguel Caignet, mouchard de la FANE au service de Mitterrand. C’est encore le même Hubert Védrine, bras droit de Mitterrand comme son père était le bras droit de Pétain, qui sera complice de l’accueil en France du terroriste Georges Habache douze ans après l’attentat de la rue Copernic perpétré par le FPLP…
En tout état de cause, et plus que visiblement, ce ne sont pas les “sionistes” qui sont à la manœuvre! C’est ce que l’historienne Annie Lacroix-Riz (qui est, rappelons-le, anti-sioniste) appelle grosso modo les “synarques”, c’est-à-dire les anciens cadres de Vichy passés à la chute de Stalingrad de la collaboration nazie à la collaboration atlantiste et qui, faute d’une réelle épuration, ont conservé leur fortune ou, moyennant une “résistance marron” — voire de faux états de service dans la résistance — , ont poursuivi sans gêne leur carrière de hauts fonctionnaires [5]. Il est clair que ce sont surtout eux qui souhaitent ardemment prendre leur revanche sur de Gaulle, au besoin, comme l’a révélé William Colby, en proposant directement leurs services à Lyndon B. Johnson et à sa CIA pour éliminer définitivement le président français de l’échiquier politique. C’est en effet la grande époque des coups d’Etat (Brésil, Chili, Indonésie, Laos…), celle de l’Opération MHChaos, lancée par Helms, qui infiltre spécialement les milieux gauchistes à l’échelle mondiale, l’époque enfin où l’on forme outre-Atlantique des projets de meurtre contre de Gaulle, comme le Chicago Tribune l’a dévoilé en 1975.
Les témoignages que publie Pierre Lurçat se concluent par celui de Frédéric Nordmann dont le sionisme a été attaqué avec la même violence pendant des décennies par les éléments les plus tarés de l’extrême droite comme de l’extrême gauche (dont la densité est assez considérable de ce point de vue). Alors: Mai 68, “complot sioniste”? Nordmann s’exprime:
La guerre des Six Jours a marqué une prise de conscience, c’est le début de beaucoup de choses: et notamment l’émergence de la question palestinienne, car avant 1967, personne ne parlait de ‘peuple palestinien’. Entre 1964 (date de la création de l’OLP) et 1967, c’était la période du ‘refus arabe’… Jusqu’en 1967, Israël n ‘était pas considéré comme un “Etat colonial” A la Sorbonne, on a assisté aux débuts du “palestinisme” après 1967. Le mouvement tiers-mondiste propalestinien est une séquelle de la guerre des Six Jours. C’est à cette époque que la propagande propalestinienne a commencé.
Il faut avouer que le “complot sioniste” de Mai 68 a choisi une forme curieuse pour se manifester dans les facultés! A moins, évidemment, de supposer que les sionistes soient des masochistes, ce dont ils n’ont jamais donné l’impression dans l’histoire, on ne voit pas pourquoi ils auraient fomenté ce complot formidable uniquement dans le but de se faire du mal à eux-mêmes!
2. 1980–1995 L’IMPOSTURE MITTERRANDIENNE: UNE COLOSSALE ENTREPRISE DE DIVERSION
Ce que le livre de Pierre Lurçat montre très bien, c’est que l’imposture mitterrandienne s’est révélée une colossale entreprise de diversion. Elle a consisté à fixer l’attention de nos compatriotes juifs sur des groupuscules folkloriques de nazis d’opérette afin de permettre aux vrais collaborateurs et nazis de se réinstaller confortablement au pouvoir et de recomposer “l’Etat profond” derrière le paravent débile et décadent du libéral-libertarisme soixante-huitard. Ainsi, tandis que les activistes juifs donnent la chasse principalement à d’inoffensifs bras-cassés déguisés comme des cons, André Bettencourt fait de bonnes affaires, Charles Trenet est décoré, René Bousquet s’amuse à Latché, Jacques Laurent est élu à l’Académie française, et l’héritage des Védrine prospère avec morgue, le fils étant bombardé à des postes aussi prestigieux qu’immérités. D’un autre côté, l’homme du faux attentat de l’Observatoire, qui a toujours été un manipulateur vicieux, compte appliquer à l’échelle nationale ce qu’il appelle en privé depuis longtemps son “piège à perdreau” afin de confisquer le discours moral et sécuritaire jusqu’à présent attaché à la droite parlementaire la plus classique.
En favorisant délibérément et artificiellement l’ascension du Front National et simultanément la création de mouvements comme SOS Racisme pour créer une psychose collective et une tension sociale, il entache du soupçon de nazisme tout ce qui ne relève que de la plus saine protection de la population et de ses frontières. Le “piège à perdreau” fonctionne à plein. Il se referme sur la droite qui ne peut plus prendre la défense légitime des Français sans se voir reprocher de “parler comme le nazi Le Pen”. La réaction propagée par les donneuses de leçons de la gauche caviar, relais grotesque mais surmédiatisé du pouvoir, devient automatique: “Comment? entend-on maintenant, vous êtes contre l’abolition des frontières? Comment, vous êtes contre la pédophilie? Mais vous parlez comme le Front National, fondé par des nazis!”
Alors, l’homme politique simplement attaché à défendre les valeurs morales les plus élémentaires ou la sécurité nationale se retrouve acculé à se défendre d’être “d’extrême droite”, parce que ses arguments légitimes, maniés par le Front National, ont été définitivement contaminés. Mitterrand, vainqueur par défaut, a désormais l’assurance de se faire réélire en 1988 pour un second mandat malgré la répugnance qu’éprouve pour sa personne la grande majorité de la population française: face à une droite tétanisée qui a vidé son programme de toute substance, il n’y a plus rien à craindre, et face au FN, il suffit d’appeler au “front républicain contre le fascisme”. C’est d’une simplicité enfantine. Désormais, le pétainiste Mitterrand a les mains libres pour implanter en France 150 quartiers du Front Islamique du Salut sans qu’on élève la moindre critique, de peur de passer… pour un nazi! Sans doute, Churchill n’a jamais prononcé cette phrase: “les fascistes de demain s’appelleront eux-mêmes antifascistes”. Et cependant! combien elle est prémonitoire concernant la Mitterrandie!
Pierre Lurçat se livre, chapitre 9, à une analyse des mobiles psychologiques qui ont guidé l’activisme juif des années 1980–1990. Il y en a plusieurs, ils sont puissants. Si l’on écarte l’attrait primaire de la bagarre pour la bagarre, qui est soit une affaire de voyous, soit une affaire d’intellectuel fasciné par la violence, on observe chez certains la transmutation de l’attachement messianique à Israël, légué par les parents, en conscience politique sous l’influence d’un événement catalyseur. Cette conscience politique est elle-même polarisée par le “refus de subir” et le désir de “faire l’histoire”, désir d’autant plus grand qu’on ressent la diaspora comme un exil et qu’on cherche une compensation à la frustration de ne pouvoir écrire l’histoire en Israël. Le problème, c’est que l’illusion d’une répétition de l’histoire à l’identique a enfermé les jeunes activistes dans un cercle vicieux qui les rend aveugles aux formes nouvelles adoptées par l’ennemi. Ils sont eux-mêmes, inconsciemment, les artisans de la diversion que Mitterrand, en les encourageant dans ce sens, va exploiter à fond pour les manipuler. Le prototype de ces opérations de manipulation que Mitterrand va passer avec succès au banc d’essai, ce sera son “coup” de la rue Copernic. Aujourd’hui, les anciens Betarim, comme Eliaou, se retournent avec sévérité sur leur passé activiste. Ils en ont cerné les causes psychologiques où ils discernent à présent qu’elles ne constituaient pas une force, mais une vulnérabilité scénarisée par Mitterrand pour les instrumentaliser:
Il y a une radicalité justifiée par notre histoire, reconnaît Eliaou, que les non-Juifs ont du mal à comprendre … Les chambres à gaz… cela n’intéresse que les Juifs et les antisémites! C’est aussi pour cela qu’on s’est focalisés sur l’extrême-droite … On avait l’impression d’une continuité historique.
Et Eliaou de conclure:
"On avait 50 ans de retard à vouloir se battre contre les nazis !"
Mais peut-être le problème ne se pose-t-il pas tout à fait dans ces termes, comme nous allons le voir. Car il existe un continuum souterrain entre certains néo-nazis, notamment ceux que le Betar a visés et la “Mitterrandie profonde”, celle du premier cercle d’intimes rescapés de Vichy: les Bousquet et autres Védrine. En revanche, il était indiscutablement stérile, exagéré, parfois criminel de prendre pour cible telle ou telle personnalité arbitrairement cataloguée à “l’extrême droite” par le pouvoir en place, ou des adolescents en plein désarroi moral et mental qui n’avaient rien trouvé de mieux pour manifester leur révolte (paradoxalement contre Mitterrand!) que d’endosser la panoplie consternante des “Hollywood nazis”.
Beaucoup d’anciens activistes l’ont compris, comme Rafael, qui évoque l’affaire de l’attentat de la rue Copernic en ces termes:
"Après Copernic, tous les hommes politiques (sous l’impulsion de Mitterrand, ndla) sont montés au créneau contre l’extrême-droite, alors qu’elle n’avait rien à voir là-dedans…
- Tu ne l’as pas compris à l’époque ?
- Non, seulement beaucoup d’années plus tard. J’ai compris que Mitterrand avait utilisé l’extrême-droite pour asseoir son pouvoir… »
- Il n’y a pas eu de débat interne au mouvement ?
- A l’époque du Bné Zeev, on frappait indistinctement les deux extrêmes. Mais avec l’OJD, c’était uniquement les nazis.
- En conclusion, penses-tu que les militants juifs de l’OJD ont été manipulés ?
- Je suis convaincu qu’on a fait une erreur et que celle-ci a été renforcée par la manipulation. Avec le recul, il est clair qu’il y avait un trop grand laxisme de la part de la police pour que cela ne soit pas lié à une manipulation politique, provenant de Joxe et de Mitterrand ».
- Dans quel but auraient-ils selon toi réalisé cette manipulation ?
- Je pense que plus on agitait le spectre de l’extrême-droite en tant qu’ennemi de la République, plus Mitterrand pouvait asseoir son pouvoir politique (comme dans l’affaire des Irlandais de Vincennes). J’ai la conviction qu’il a dit: “laissez faire les types de l’OJD, c’est bon pour nous!” […] Mitterrand avait besoin d’agiter le spectre de l’extrême-droite… Ainsi les Juifs ont servi les calculs politiques de Mitterrand."
Il reste toutefois à insister sur la fonction de la mise en scène de cette guerre des fantômes qui avait essentiellement l’avantage de détourner l’attention du passé des vrais pétainistes à la tête de l’Etat. En tout état de cause, pour comprendre les propos tenus dans L’Etoile et le poing, il est indispensable de revenir 45 ans en arrière et de rappeler comment Mitterrand a cyniquement exploité l’attentat de la rue Copernic. Cette opération d’intoxication de l’opinion publique fut le coup d’envoi à deux septennats de manipulations de la société française au seul avantage de Mitterrand, de son cercle intime de pétainistes impénitents et de leurs satellites. Fondatrice, cette manipulation contient en germe tous les problèmes, tous les crimes d’un des gouvernements moralement les plus corrompus que la France ait connus.
Octobre 1980: Salim Abou Salem, terroriste fanatique et chef de la section “opérations spéciales” (OS) du Front populaire de libération de la Palestine (FPLP), une faction gauchiste de l’OLP dirigée par Georges Habache, envoie en France trois Palestiniens qui acheminent une bombe par la valise diplomatique libanaise. On a intimé l’ordre à Hassan Diab, membre du FPLP-OS, d’organiser une “opération extérieure”, c’est-à-dire un attentat terroriste sur le sol français. Il s’agit de placer une bombe rue Copernic, face à la synagogue de l’Union libérale israélite de France. Le vendredi 3 octobre 1980, cette bombe va tuer quatre personnes et en blesser grièvement quarante-six autres. Aussitôt leur crime accompli, les Palestiniens se sont envolés pour Beyrouth. Quarante-cinq minutes se sont à peine écoulées que l’Agence France Presse reçoit un appel téléphonique d’un membre des Faisceaux Nationalistes Révolutionnaires, nouvelle mouture de la FANE (Fédération d’action nationale et européenne) qui a été dissoute, jour pour jour, un mois auparavant. Ce membre s’appelle Jean-Yves Pellay: il revendique l’attentat. Pellay est défavorablement connu des services de police comme un affabulateur et un opportuniste vénal. C’est en effet ainsi que le décrit Jean-Pierre Pochon, alors jeune commissaire de police, qui dirige la section des Renseignements généraux spécialisée dans la lutte contre le terrorisme d’extrême gauche et moyen-oriental. Dans ses mémoires intitulés Les Stores rouges, publiés en 2008, Pochon expose de façon très instructive le contexte de l’attentat de la rue Copernic:
La Direction centrale des RG reçoit du ministre de l’Intérieur Christian Bonnet l’ordre de « mettre le paquet » sur l’extrême droite néo-nazie dont une partie (pro-Mitterrand) de la presse affirme qu’elle a noyauté la police française et plus particulièrement les Renseignements généraux. Le directeur adjoint, Pierre Bergeret, me convoque et me demande de mettre les moyens de la section sur ces mouvements néo-nazis. Afin de mieux cibler nos objectifs je décide de créer un groupe de travail en liaison avec la section Analyse. La Fédération d’action nationale et européenne (FANE), groupuscule néo-nazi qui a été dissous le 3 septembre 1980, et l’Œuvre française de Pierre Sidos sont nos objectifs prioritaires […] Nous ciblons deux militants deux militants de la FANE, très proches de son leader Marc Fredriksen. L’un d’eux (Pellay), particulièrement médiatisé pour ses prises de positions antisémites, est approché et je n’ose dire « retourné ». Tout de suite, nous nous rendons compte de l’ambiguïté du personnage qui offre ses services au premier venu.
Malgré la revendication de Pellay, personne, du côté de la Direction de la surveillance du territoire (DST), ne considère comme crédible la thèse d’un attentat d’extrême droite, et déjà on s’apprête à orienter l’enquête en direction du terrorisme palestinien. Mais Mitterrand compte exploiter cyniquement, et à fond, l’événement pour diffamer Giscard au maximum en instrumentalisant la communauté juive. Il se sert notamment à cette fin de BHL qui, depuis 1971, cultive — suivant l’excellente formule de Xavier de La Porte et Jade Lindgaard — un “ethos de vassal” vis-à-vis de Mitterrand. Celui-ci, d’ailleurs, vient d’être son témoin de mariage avec l’éditrice Sylvie Bouscasse (le 9 mai 1980). BHL et Mitterrand défilent en tête des cortèges. La théorie du “climat” est née: Giscard est responsable d’avoir “instauré un climat” propice à la renaissance du nazisme! Il est difficile d’imaginer un bobard plus délirant, mais l’intoxication médiatique est insensée autour de cette récupération mitterrandienne. Conséquence: les sondages qui plaçaient Giscard largement en tête devant Mitterrand jusqu’en octobre 1980 montrent à présent une brutale inversion de tendances. Toujours utile, la théorie du “climat” fera un retour fracassant dix ans plus tard, à l’occasion de la récupération politique de la profanation du cimetière de Carpentras; cette fois, c’est le Front National qui en fera les frais.
Le pétainiste Mitterrand, parfaitement informé de la culpabilité du Front populaire de libération de la Palestine, défile contre “l’extrême droite” après l’attentat de la rue Copernic. La queue de cortège a pour consigne de scander: “Bonnet, Giscard, complices des assassins!”
Pourtant, l’intuition des services de renseignement est presque immédiatement confirmée par un rapport de la STASI. Alain Chouet, chef du bureau de coordination des recherches et opérations anti-terroristes, explique:
"Dès le mois de novembre 1980, les services de renseignements français en coopération avec leurs homologues allemands ont relevé des éléments significatifs et concordants impliquant dans l’attaque cinq militants palestiniens venus de Beyrouth avant d’y retourner aussitôt."
Peu importe la vérité; à peine élu, en mai 1981, Mitterrand va exercer toute la pression possible pour pousser jusqu’au bout la manipulation de la communauté juive en la focalisant exclusivement sur ce faux coupable, ce fantoche gonflé à l’hélium: la très fantasmatique “internationale noire” de “l’extrême droite” “néo-nazie”. Il nomme Paul Roux à la tête des Renseignements généraux qui transmet officiellement à ses subordonnés la consigne du pouvoir. Elle est formelle: interdiction de chercher dans une autre direction que “l’extrême droite” les responsables de l’attentat de la rue Copernic. En deux phrases, Pochon traduit l’état d’esprit de son service; ses collègues ont accueilli les nouvelles directives dans la sidération:
"Le silence est total. Je prends conscience ce soir-là que la politique vient de faire une entrée officielle et fracassante dans le service."
Un élément bizarre vient s’ajouter à ce dossier. Jean-Yves Pellay, l’auteur du coup de fil déclencheur qui s’est pavané dans les rédactions pour se présenter comme “juif”, ce qu’il n’est pas, et comme “membre de l’Organisation Juive de Défense”, ce qu’il n’est pas non plus, est arrêté le 29 novembre au domicile de sa mère, en Saône-et-Loire. Suivant le code de procédure de la Cour de sûreté de l’État, il ne peut être interrogé plus d’une semaine. Or on l’incarcère cinq mois et son avocat ne lui rend pas visite. C’est seulement le 3 mars que Pellay est relâché en liberté provisoire. Lui-même le fait remarquer: “Mitterrand, lors de son élection en 1981, a amnistié tous les détenus politiques… sauf moi.” Tout cela est d’autant plus suspect que c’est Pellay qui a pris l’initiative d’entrer en contact avec l’Organisation Juive de Défense pour proposer d’infiltrer la FANE [6].
Mais il y a beaucoup plus troublant concernant la FANE, ce sont les relations intimes que l’ex-trésorier vitriolé Miguel (dit “Michel”) Caignet entretient avec le premier cercle d’intimes de Mitterrand, le plus étroit, composé de ses vieux compagnons de Vichy. Pierre Lurçat nous apprend, et c’est un scoop, car je ne pense pas avoir jamais lu cela quelque part, que Moché Cohen avait infiltré la FANE où il fait la connaissance d’Yves Jeanne, le parrain de Caignet dans le milieu néo-nazi. Moché raconte:
Plus tard j’ai dîné avec Mark Fredriksen… j’ai dîné plusieurs fois avec ces nazis. J’ai même mangé du jambon. Un soir, je me trouve nez-à-nez avec Yves Jeanne, un vétéran de la Deuxième Guerre mondiale. Il me racontait ses souvenirs de la Division Charlemagne! Il avait des tendances homosexuelles, ce qui me mettait mal à l’aise, et il faisait toujours des plaisanteries du genre “A Dachau les Juifs mangeaient mieux que moi”. Je suis rentré chez moi à 5 heures du matin, je n’ai pas dormi de la nuit… J’ai tellement été choqué par cette rencontre que pendant plusieurs jours, j’avais peur de rester en groupe avec d’autres Juifs!”
Ancien sergent recruteur de la LVF, puis de la 33e division “Charlemagne” de la Waffen-SS, Yves Jeanne avait présidé la branche française de la World Union of National Socialists créée par George Lincoln Rockwell. Il avait ensuite créé à Nantes, en 1972, Le Devenir européen, fanzine ronéotypé à vocation prétendument “païenne” et lié à des groupuscules de cinglés plus ou moins satanisants tels que le Cercle Lux Fero (pour Lucifer). C’est dans ce contexte qu’évolue Michel Caignet, trésorier de la FANE.
Dans les premiers jours de 1981, Pierre Lurçat raconte comment le Betar, sous la dénomination précaire des “Brigades juives”, décide d’organiser “l’une des actions les plus violentes de l’activisme juif en général”. Au programme: l’assassinat de Maurice Bardèche (qui, en passant, n’était pas le “neveu de Brasillach”, mais son beau-frère: Bardèche avait épousé Suzanne Brasillach). Henri Coston est une cible également, et l’on a planifié la défiguration au vitriol de Bousquet comme de Caignet, le trésorier et propagandiste de la FANE. Toutes les opérations échouent, sauf celle consistant à asperger Michel Caignet d’acide sulfurique. Caignet est surpris à la sortie de son domicile, à 8 heures 30, le 29 janvier 1981, puis roué de coup et défiguré. Yves Aziza, le responsable, se réfugie en Israël aussitôt après l’agression. Si le procédé employé est déplaisant, Caignet n’est pas pour autant inoffensif, et on aurait pu rêver quelque chose d’à la fois plus propre et plus définitif le concernant. Caignet, en effet, représente finalement beaucoup plus qu’on ne pense: c’est un criminel dangereux. Mais, chose que les Betarim ignorent, il est protégé par le pouvoir mitterrandien. D’ailleurs, après l’agression au vitriol, Caignet, pour ses soins — greffes de peau, opération de la cornée — bénéficie par on ne sait quel prodige du “fonds de garantie aux victimes du terrorisme” qui n’est même pas encore officiellement en vigueur et auquel il ne peut théoriquement prétendre.
Traducteur en 1976 du Mensonge d’Auschwitz (“Die Auschwitz Lüge”, 1974), du SS négationniste Thies Christophersen, dont François Duprat assure la diffusion, Michel Caignet est la cheville ouvrière de réseaux néo-nazis dont on apprendra bientôt qu’ils pratiquent la traite des enfants pour alimenter des groupes pédocriminels à rituels sataniques (“Un Entretien avec Bernard Alapetite”, L’Evénement du jeudi, n° 657, 5–11 juin 1997). Caignet est notamment en contact étroit non seulement avec Michael Kühnen, le néo-nazi allemand promoteur d’une doctrine “homosexualiste” dont Caignet traduit le manifeste Nationalsozialismus und Homosexualität (1986) [7], mais encore avec Nicholas Glencross, l’ami — depuis Vichy — des Védrine et de Mitterrand, qui abrite dans son presbytère de Saint-Léger-des-Vignes (Nièvre) le plus gros studio pédopornographique d’Europe. Caignet, en effet, a profité des auspices nivernais de Mitterrand le Morvandiau pour ouvrir un bordel à jeunes garçons dans la commune de Saint-Père (Nièvre). C’est lui qui diffuse la production de Glencross. Nous sommes en 1986, dix ans après le Mensonge d’Auschwitz, et Caignet, qui n’a renoncé à aucune de ses vues, publie à présent un bimestriel, Gaie France, qui est ouvertement pédophile. Il faudra néanmoins attendre 6 ans pour que le pouvoir mitterrandien l’interdise non tout court, mais seulement “à la vente aux mineurs”, par l’arrêté ministériel du 27 mai 1992, pour “incitation à la pédophilie”. Le torchon pédophile Gaie France continuera donc de paraître sans obstacle sous les deux septennats de Mitterrand.
Cette invraisemblable mansuétude mitterrandienne dont Caignet continue d’être le bénéficiaire privilégié sera confirmée par un événement décisif. Déjà, Paul Quilès, directeur de campagne de François Mitterrand en 1981 devenu entre-temps ministre de l’Intérieur, avait fait savoir que Michel Caignet ne serait pas davantage poursuivi pour ses activités pédocriminelles que pour son militantisme néonazi, parce qu’il “rendait des services”. Quand en 1990, Glencross est arrêté à Saint-Léger-des-Vignes et que la police découvre dans son presbytère [8] un studio de pornographie infantile et la plus importante collection de photos pédophiles d’Europe (30000 pièces), Caignet n’est pas inquiété. Evidemment, Glencross, aussitôt arrêté, décède opportunément d’une crise cardiaque, ce qui interrompt l’enquête. Mais au cours des années suivantes, le nom de Caignet apparaît dans toutes les affaires de réseaux du même type. Or il faudra attendre la mort de Mitterrand, en janvier 1996, pour qu’enfin on se décide à l’appréhender dans le cadre de l’affaire “Toro Bravo”, réseau ouvertement néonazi et ostensiblement “satanique” à l’iconographie éloquente. Toro Bravo pratique le trafic de jeunes garçons en Europe et Amérique latine.
A l’examen, il n’y a rien là de bien nouveau, et l’activité du Michel Caignet de la FANE s’inscrit dans une continuité qui remonte loin: la Nièvre de Mitterrand comme épicentre de la pédocriminalité directement liée aux réseaux pétainistes de Vichy a déjà défrayé la chronique judiciaire en 1959. C’est dans la Nièvre, en effet, alors que Mitterrand est député de la IIIe législature (1956–1958), que le pétainiste Fernand Maillet, décoré de la francisque comme Védrine et Mitterrand, vient organiser ses “ballets bleus” avec des petits chanteurs à la croix de bois, à La Chapelle-Saint-André, plus précisément. Les complices de Maillet seront arrêtés et condamnés, mais le vieil abbé pétainiste sera finalement relaxé sur l’intervention de Mgr Feltin, archevêque de Paris et collaborateur de compétition sous l’Occupation (il est alors évêque de Bordeaux). Tout cela n’est ni anecdotique, ni anodin, et montre que l’affaire est plus complexe qu’on ne pense. La différence entre un Caignet de la FANE et le cercle intime des pétainistes autour de Mitterrand est davantage une différence de degré que de nature.
Certains devaient le pressentir. Pierre Lurçat, naturellement, qui comprend très vite à qui il a affaire, mais d’autres aussi, comme Yvan O., un ancien du Tagar qui vit maintenant en Israël, et dont L’Etoile et le poing reproduit les propos:
"J’avais participé à cette action [siffler les tartufferies de Mitterrand lors des commémorations du Vel’-d’Hiv’] un peu à cause de mon grand-père, qui était dans la Résistance à Pau et connaissait bien le préfet Beylau, qui a été ensuite viré par Mitterrand… Mon grand-père connaissait tout du passé vichyste de Mitterrand (il votait Chirac à cause de cela). Moi aussi, je savais que Mitterrand n’était pas “casher”…"
La manipulation des jeunes activistes qui pressentaient une possible imposture avait par conséquent supposé la complicité d’intermédiaires leur inspirant confiance et susceptibles de les mystifier. Par touches allusives, mais insistantes, Pierre Lurçat suggère, me semble-t-il, les noms de Jean-Pierre Pierre-Bloch (qui, je l’avoue, m’était totalement sorti de l’esprit depuis longtemps), de Kiejman, le mari de Marie-France Pisier, fille de Georges Pisier, haut fonctionnaire français vichyste et maurrassien, et, naturellement, de Badinter (dont l’attachement à Mitterrand est à mettre d’après moi sur un tout autre compte que l’aveuglement ou la “loyauté” chevaleresque). Si je l’interprète convenablement (il me le dira), je pense que Pierre Lurçat a raison. La lecture de L’Etoile et le poing m’a poussé à revoir toute cette période dont j’avais naturellement oublié des pans entiers. Or ce qui s’est immédiatement dégagé à l’examen de leurs relations avec Mitterrand, et qui est la pierre de touche de cette complicité dans la mystification, c’est la volonté partagée, sur une très longue durée, par Jean-Pierre Pierre-Bloch, Kiejman et Badinter, de faire passer — en toute connaissance de cause — le faux mouvement de résistance inventé par Mitterrand, le RNPG, pour un vrai, alors qu’il n’est en réalité qu’un sas de décontamination pour pétainistes où l’on retrouve les Jean Védrine, Nicholas Glencross et André Bettencourt dont Serge Klarsfeld a finalement démasqué l’imposture.
Dès la fin des années 1940, Michel Cailliau, premier chef du mouvement de résistance des prisonniers de guerre à l’occupation allemande et neveu du général de Gaulle, dénonce la mystification du RNPG. Il écrit:
"Selon moi qui l’ai bien connu en fin 1942 début 1943, et par mes adjoints, en 1944, François Mitterrand n’a pas participé à la Résistance pour la libération de la France contre l’occupant allemand et le régime complice de Vichy. Bien au contraire, s’il a obtenu la francisque de Pétain en novembre 1943, après l’avoir sollicitée, et après que sa demande ait été justifiée par son comportement pro-Pétain, c’est parce que la police de Vichy [s’agit-il des premiers contacts avec René Bousquet, auteur de la collaboration policière avec les nazis pour les arrestations et déportations des Juifs notamment du Vel d’Hiv., en juillet 1942 et du Vieux Port à Marseille en janvier 1943, alors secrétaire général à la police avec rang de ministre ?] et les faits prouvaient qu’il avait bien fait don de sa personne à Pétain. À ma connaissance ni Mitterrand, ni le RNPG (dont il aurait été membre et qui n’avait RIEN de résistant), n’ont fait partie de l’ORA, ni du réseau des ministères. Tout le reste n’est qu’invention."
Mitterrand ne peut rien répondre à cette vérité flagrante qui l’accable. Il se déplace donc sur le terrain, qui lui est familier, de la diffamation, et déclare en 1973 aux journalistes de L’Expansion que Cailliau aurait “recommandé à son oncle (de Gaulle) de se “débarrasser” de Mendès France, de Pierre Cot, et de (lui).”
Immédiatement, Michel Cailliau défère Mitterrand devant la 17e chambre correctionnelle. Dans ses mémoires, Jusqu’au dernier jour (Albin Michel, 1983), Jean-Pierre Pierre-Bloch fait cet aveu saisissant où l’on comprend que le passé collaborationniste de Mitterrand n’a aucune importance à ses yeux:
"Badinter défend Mitterrand […] Pour Mitterrand, je passe toute la journée au palais de justice. […] Mais l’affaire se complique. Nous sommes à la veille de l’élection présidentielle. L’article 6 du code électoral prévoit qu’un citoyen condamné à plus de 3 000 francs d’amende est privé temporairement du droit de vote et surtout d’élection. […] Badinter va tout faire pour empêcher le tribunal de juger le jour même. Le jugement est rendu le 24 avril. Badinter fait appel et fait ouvrir le greffe du tribunal en ma présence pour suspendre l’exécution de la sentence. Le 4 mai, […] dans une rubrique de France-Soir […], on peut lire : « Tribunal de grande instance de Paris (XVII e chambre), jugement du 24 avril 1973, le Tribunal […] déclare François Mitterrand coupable du délit de complicité de diffamation publique envers un particulier… condamne François Mitterrand à 2000 francs d’amende. » On a eu chaud… Mitterrand pourra être candidat de la gauche."
Bien des années plus tard, l’historien Pierre de Vernejoul (Oublier? — Jamais!: 1939–1945, p. 271) rappelle cette dernière péripétie dans la “tentative pour crédibiliser la mystification permanente” [9] d’un Mitterrand résistant: l’arrêté de 1992. On y retrouve l’inénarrable Paul Quilès, et bien sûr Pierre Joxe, et l’on s’aperçoit qu’en effet, Kiejman y joue un rôle troublant, tout à fait dans le prolongement du Badinter de 1973, visant à imposer officiellement le mensonge de la “résistance” des Mitterrand, Védrine, Bettencourt, Glencross et consorts à travers l’accréditation illégitime du RNPG, que les vrais résistants surnommaient plaisamment le “Ramassage National des Pétainistes Gênés”:
Si ce “groupe Pinot” ou RNPG avait été réellement un mouvement de résistance reconnu par les autorités de la France libre , pourquoi Mitterrand s’est-il obstiné à obtenir une reconnaissance officielle? C’est en effet contre toute légalité que le ministre socialiste de la Défense, Paul Quilès, signa un arrêté le 5 mars 1986 assimilant les RNPG, le CNPG et le MNPGD comme “unités combattantes au titre de la résistance intérieure française pour la période du 22 mars 1944 à la Libération”! Cet arrêté fut cassé en Conseil d’État le 15 février 1991 sur requête du colonel Francis Masset [10], car signé sur la base de documents inexacts! En 1992, Mitterrand, en faisant signer par Pierre Joxe, nouveau ministre socialiste de la Défense, un nouvel arrêté, consacra la machination par laquelle il entretint la confusion des esprits pendant plus de dix ans. Peu après, le ministre socialiste Kiejman questionné à l’Assemblée nationale prononcera le terme de “raison d’État”! L’histoire jugera.
3. LE DOUBLE JEU DE FRANCOIS MITTERRAND ET L’EXPLOITATION DU “SIGNE JUIF” (P. Lurçat)
“Que [l’]utilisation du “signe juif” ait commencé à l’époque du président François Mitterrand n’est évidemment pas fortuit. Celui-ci était en effet l’homme politique qui a le plus exploité la présence de personnalités juives, dont il aimait à s’entourer pour jeter un voile opaque sur ses véritables intentions et motivations. Le seul président de l’histoire politique française qui était un authentique homme d’extrême droite, ancien cagoulard décoré de la francisque, devenu “socialiste” par pur opportunisme, a pu ainsi s’acheter une réputation d’ami des Juifs qui perdure jusqu’à ce jour.” — Pierre Lurçat
L’Etoile et le poing rappelle que beaucoup de jeunes Juifs deviennent activistes après la manipulation de Carpentras. C’est le cas d’Avi, par exemple, qui rejoint le Tagar après la profanation du cimetière:
"[E]n 1990 se déroule un événement qui va, littéralement, me révolter. Lorsque j’apprends la profanation du cimetière juif de Carpentras, je décide de me rendre pour la première fois de ma vie à une manifestation. Je me suis donc rendu, seul, à un rassemblement organisé, le 13 mai 1990, place Saint Augustin. Tout ce qui compte dans le milieu juif activiste semblait s’être alors donné rendez-vous à cet endroit."
Mais aujourd’hui, ces activistes ne se font plus d’illusions. Ils ont la conscience sèche et lucide de s’être fait magistralement manipuler par Mitterrand. Eliaou expédie l’affaire en une phrase définitive:
"A Carpentras, le gouvernement de Mitterrand a manipulé les Juifs !"
La machination de Carpentras: le pétainiste Mitterrand, complice de Bousquet, en compagnie de Hubert Védrine, fils de Jean Védrine, membre de la Cagoule, haut fonctionnaire de Vichy et décoré de la francisque, défile contre… “l’extrême droite antisémite”!
C’est ce que confirme, en effet, Yves Bertrand, directeur central des Renseignements généraux de 1992 à 2004, quand il détaille la machination orchestrée par Mitterrand pour récupérer cyniquement l’affaire de la profanation du cimetière juif de Carpentras. Pourtant, à Carpentras comme à Paris, la consternation de la communauté juive s’accompagne d’une réticence évidente à manifester dans la rue. Simone Veil appelle à “ne pas imputer à quiconque, sans preuves, la responsabilité de Carpentras”. Mais Mitterrand a choisi de se servir des Juifs malgré eux, et de les entraîner de force dans une manipulation politique. Bertrand expose la situation au journaliste Eric Branca:
"L’exemple le plus grossier [de manipulation politique] me paraît être l’affaire de Carpentras. Je rappelle brièvement les faits. Au matin du 10 mai 1990, on découvre que le cimetière juif de Carpentras a été profané. […] Sur les lieux mêmes du drame de Carpentras : aucun indice, pas la moindre inscription. Seuls points de départ de l’enquête : la revendication téléphonique du forfait par une voix à fort accent arabe et le fait qu’un mois avant le crime, un skinhead d’origine maghrébine avait tenté de s’introduire nuitamment à l’intérieur du cimetière juif de Carpentras.
[…] Sur place, l’émotion, on s’en doute, est énorme. Mais elle est contenue. […] les Juifs de Carpentras […] n’ayant jamais été confrontés à l’antisémitisme, ils ont donc eu comme premier réflexe de réclamer aux enquêteurs une discrétion maximale : pas de vagues tant qu’on ne connaissait pas les responsables de la profanation. […] A peine connue la nouvelle de Carpentras, les autorités ont sciemment ignoré la crainte légitime des autorités juives. Elles ont désigné un coupable, et un seul : Jean-Marie Le Pen et le Front national ! […] L’ordre venait de François Mitterrand en personne qui tenait là l’occasion qu’il cherchait pour diaboliser le Front national après avoir puissamment contribué à son émergence.
[…] Jean-Pierre Pierre-Bloch dénonce, au nom de la Licra, « la montée du racisme, du nazisme et de l’antisémitisme… » […]
Et le samedi, les plus hautes autorités interviennent pour mettre au point la stratégie de « front anti-Le Pen » qui va culminer avec le défilé du lundi : 200000 personnes de la République à la Bastille pour protester contre la renaissance de l’antisémitisme. […] En tête, François Mitterrand, seul chef d’Etat à participer à une manifestation depuis la libération de Paris, et l’ensemble du gouvernement. Seule à garder la tête froide, Simone Veil appelle à « ne pas imputer à quiconque, sans preuves, la responsabilité de Carpentras »… […] A l’origine, les autorités religieuses juives de Paris (le Consistoire israélite en particulier), comme celles de Carpentras, ne souhaitaient pas que cette manifestation prenne un tour aussi politique. Leur principal argument : éviter que se reproduise la récupération par l’extrême gauche du défilé de protestation organisé en 1980 après l’attentat de la rue Copernic (mis à l’époque, déjà, sur le compte de l’extrême droite, alors qu’il avait été le fait d’un réseau arabo-arménien)… D’où le souhait des dirigeants communautaires d’organiser cette fois la manifestation autour d’un office religieux à la Grande Synagogue de Paris, dénouement d’une marche recueille de la Concorde à la rue de la Victoire, près de l’Opéra.
François Mitterrand [va faire changer l’itinéraire] via le ministère de l’Intérieur. Je peux vous le dire, j’étais dans le bureau d’un des conseillers du ministre quand l’ordre est tombé pour forcer la main aux autorités juives." (Yves Bertrand, Je ne sais rien… mais je dirai (presque) tout, Plon, 2007, pp. 120 et sq.)
Néanmoins, la manipulation de Carpentras n’est pas toute suite détectée. C’est la convergence du scandale autour de l’affaire Bousquet, de l’intempestive couronne de roses rouges déposées chaque année sur la tombe de Pétain et de l’hypocrite commémoration du Vel’ d’Hiv’ qui va déboucher sur la prise de conscience des jeunes militants des groupes d’autodéfense.
Récapitulons. En janvier 1942, Mitterrand, soi-disant “évadé traqué par les Allemands”, travaille en réalité à la Légion française des combattants et des volontaires de la révolution nationale en tant qu’agent contractuel du gouvernement de Vichy. Il évolue alors dans un milieu littéralement structuré par les membres de la Cagoule. Sa fusion totale dans l’environnement cagoulard suppose qu’il bénéficie d’une confiance que des hommes aguerris aux pratiques clandestines n’accordent jamais à des inconnus. À la Libération, d’ailleurs, il est aussitôt recruté par Eugène Schueller, président de L’Oréal et ancien soutien financier de la Cagoule, en tant que rédacteur en chef du magazine Votre beauté.
Dès sa nomination au ministère de l’Intérieur, en 1954, Mitterrand repêche l’équipe au complet de René Bousquet, le responsable de la rafle du Vel d’Hiv, et s’entoure ainsi des pires partisans de la Collaboration avec l’Allemagne nazie. Il nomme Jean-Paul Martin directeur adjoint de son cabinet, bien que celui-ci ait été exclu de la fonction publique à la Libération. Il s’emploie même à faire disparaître son dossier d’épuration. Or Martin avait été directeur de cabinet de René Bousquet et avait joué un rôle actif dans la déportation des Juifs étrangers au printemps et à l’été 1942, ainsi que dans les arrestations de Juifs français, aussi bien en zone occupée qu’en zone libre, entre 1942 et 1943. Cette même année 1942, il avait remis aux autorités allemandes des cartes d’identité françaises destinées à couvrir des agents du Reich opérant en zone libre, contribuant ainsi à la détection des émetteurs clandestins transmettant vers Londres. Par la suite, François Mitterrand ira jusqu’à distinguer Jean-Paul Martin en le faisant officier de la Légion d’honneur et commandeur de l’ordre national du Mérite. Il assistera à ses obsèques et veillera personnellement à ce que le cercueil soit recouvert du drapeau tricolore.
Le choix de Jean-Paul Martin par François Mitterrand n’a rien d’une erreur ou d’un malentendu puisqu’il recrute également Jacques Saunier, Yves Cazeaux et Pierre Saury. Jacques Saunier, appelé en 1942 par René Bousquet à la sous-direction des Renseignements généraux, fut un collaborateur zélé des autorités nazies. Il apporta son soutien aux Brigades spéciales, responsables en 1943 de plus de 1500 arrestations dans les milieux de la résistance juive et communiste. Pourtant, François Mitterrand le nomme chargé de mission, avec le grade de sous-préfet hors classe. De même, Pierre Saury, nommé commissaire par René Bousquet, était devenu intendant de police à Lyon à la fin de l’année 1943 — une fonction équivalente à celle de préfet. Révoqué de la fonction publique à la Libération, il est néanmoins réintégré par François Mitterrand, alors ministre, qui le désigne même comme son suppléant dans la Nièvre lors des élections législatives de 1967.
Bousquet comme un coq en pâte en 1974 à Latché, le Colombey-les-deux-Eglises de Mitterrand, où séjourner est reçu comme une marque de distinction.
Mitterrand a conservé toutes ses relations pétainistes. Celles-ci forment le vrai tissu de ses relations intimes. Et pour cause! Pétainiste, Mitterrand l’est resté. Intégralement. C’est pourquoi, à partir de 1984, il va faire fleurir, chaque année, la tombe de Pétain à l’île d’Yeu. D’abord, un 22 septembre, puis un 15 juin, ensuite un 12 mai, et enfin tous les 11 novembre sans exception. Au début, ce lourd symbole va passer inaperçu. Mais dès 1987, avec les révélations qui commencent à circuler dans la population française sur le passé louche et les amitiés scabreuses de Mitterrand, l’inquiétude s’exprime de plus en plus fort. On va même sommer Mitterrand de s’expliquer. Menteur effronté, comme à son habitude, Mitterrand joue les innocents et prétend sacrifier à une “tradition républicaine” (!) instaurée par… le général de Gaulle! Invraisemblable impudence de la part de l’arsouille, comme l’appelait à juste titre Charles de Gaulle, en répondant à Roger Frey, résistant, déporté et baron du Gaullisme, qui voulait qu’on évente le faux attentat de la rue de l’Observatoire et les connivences pétainistes de Mitterrand:
Mitterrand et Bousquet, ce sont les fantômes qui reviennent: le fantôme de l’antigaullisme issu du plus profond de la Collaboration. Que Mitterrand soit un arriviste et un impudent, je ne vous ai pas attendu pour le penser! C’est une arsouille.
Jamais de Gaulle n’a fait spécialement fleurir la tombe de Pétain, encore moins “tous les 11 novembre”, et Mitterrand le sait bien! La vérité, c’est que le 11 novembre 1968, à l’occasion exceptionnelle du jubilé de l’armistice de 1918 mettant fin aux combats de la Première Guerre mondiale, Charles de Gaulle a fait fleurir la tombe de tous les généraux français de 14-18, sans exception. Il se trouve, naturellement, que Pétain était du nombre au même titre que n’importe quel autre général. La gerbe de chrysanthèmes ne témoigne par conséquent d’aucune attention particulière. C’est la même pour tous. Les mobiles de Mitterrand sont totalement différents. Sa gerbe de fleurs annuelle est un signe exclusif de fidélité au pétainisme et une provocation. S’il s’imagine très malin en pensant noyer le symbolisme des roses rouges sur la tombe de Pétain dans celui du parti socialiste, la véritable signification n’échappe à personne de lucide. D’une part, il ne s’agit pas d’un hommage du parti socialiste à Pétain et d’autre part, le symbolisme funéraire est fixé depuis longtemps. La rose rouge sur une tombe, en France, signifie sans ambiguïté l’hommage admiratif et une loyauté ardente dans la poursuite de l’engagement. Comme Pierre Lurçat le comprend alors très vite, en dépit de sa jeunesse, Mitterrand croit pouvoir faire ce qu’il veut en s’abritant derrière le cordon sanitaire des Juifs dont il s’est entouré et qui vont, pense-t-il, neutraliser les autres. Calcul on ne peut plus pervers, et qui témoigne du mépris de Mitterrand pour les Juifs — mépris qui va s’exprimer le 12 septembre 1994 au micro de Jean-Pierre Elkabbach dans une formule irrévocablement révélatrice envers ces “gens qui ne sentent pas profondément ce que c’est que d’être français, l’honneur d’être français et l’honneur de l’histoire de France”!
Exploitation du “signe juif”: immonde tartufferie de l’homme de Vichy qui, dès 1954, a protégé et recyclé la bande à Bousquet, le responsable de la rafle du Vel’ d’Hiv’, et s’est arrangé pour que celui-ci ne soit jamais jugé. Pierre Lurçat et ses amis bravent courageusement l’Etat français en hurlant: “Mitterrand à Vichy!”
La commémoration du Vel d’Hiv du 16 juillet 1992 en présence de Mitterrand est explosive. Les membres du Tagar se sont munis de sifflets qui sont saisis par la police. Pierre Lurçat plante le décor:
Dans la foule hétérogène, la centaine d’intellectuels du très actif ‘Comité Vel d’Hiv 42', qui faisait parler de lui depuis qu’il avait demandé à Mitterrand, — sans l’obtenir — , la ‘reconnaissance officielle des persécutions et des crimes de Vichy contre les Juifs’ les jeunes juifs du Betar avec pancartes et drapeaux, très agités ce jour-là ; la vieille gauche juive, les amis des Aubrac, et puis la foule des déportés, des enfants de déportés et des anonymes. Il y avait de l’électricité dans l’air.
Pierre Lurçat est alors “un jeune Juif de 25 ans”.
"Ce jour-là, nous étions venus au Vel d’Hiv, lieu de sinistre mémoire, pour interpeller le président de la République, François Mitterrand. Nous avions distribué un tract, en pointant l’ambiguïté de la position de Mitterrand vis-à-vis du régime de Vichy et son refus de reconnaître la responsabilité de l’État français (et, accessoirement, de mettre fin à la tradition de dépôt d’une gerbe sur la tombe du maréchal Pétain, à l’île d’Yeu). A nos yeux, comme à ceux des anciens déportés et survivants de la Shoah qui étaient venus se recueillir en ce lieu symbolique, il était scandaleux que le président de la République puisse venir au Vel d’Hiv dans ces conditions. Quand François Mitterrand est arrivé sur les lieux, il a été accueilli par des huées, des sifflets et des cris : “Mitterrand à Vichy!”. Robert Badinter, le visage contorsionné par un rictus de haine, a alors prononcé un discours d’une extrême violence, tout entier dirigé contre… les militants juifs, qui lui avaient “fait honte”! A la sortie de la manifestation, j’ai été interpellé par deux policiers en civil, et j’ai passé la nuit au poste, accusé “d’insulte au chef de l’État”."
Après une nuit au commissariat central du 14e arrondissement, un journaliste de France-Soir le contacte au local du Tagar et vient l’interviewer.
"Son article, publié le 18 juillet en Une du quotidien, est plutôt sympathique : Allure d’étudiant consciencieux, le président du Tagar a rempli sa mission : créer l’élan de protestation qui, jeudi soir, a sérieusement perturbé la cérémonie du Vel d’Hiv"
D’une hypocrisie finie, conformément à sa vieille habitude, Mitterrand va faire semblant de pleurnicher, le vieux crocodile, dans le giron de Georges-Marc Benamou pour lui dire qu’il se sent “trahi par les Juifs”. Un tel culot dans l’inversion accusatoire n’est pas donné à tout le monde! Mais, jamais avare de tartufferie et toujours armé d’une dose de venin à cracher contre le général de Gaulle, il aurait déclaré:
"Comme les Juifs savaient que j’étais leur ami, alors ils se sont permis avec moi ce qu’ils ne se seraient pas permis avec mes prédécesseurs — qui n’étaient pas leurs amis… Ont-ils osé demander cela à de Gaulle… ? Est-ce qu’ils ont osé le harceler, afin d’obtenir de lui ces excuses de la France ? Oh non…"
Cette tirade a tellement l’accent d’un personnage de faquin pioché dans les comédies de Molière qu’on se surprend à douter de son authenticité.
Pour conclure, il me semble que l’important travail de Pierre Lurçat nous invite à aller beaucoup plus loin que la seule histoire des groupuscules d’autodéfense. Je ne prétends pas deviner l’objectif projeté par l’auteur au-delà de cette lecture. Mais je le prends, personnellement, comme un appel à secouer cet universalisme piégé qui veut qu’on confonde les mots avec les essences, qui égare le jugement et enraye la continuité de la lutte efficace. Le nazisme a changé de peau. Il n’était pas fixé de toute éternité dans l’uniforme SS. Par-delà non “l’insondable renaissance des formes”, mais la très sondable renaissance des formes, nous sommes amenés à établir en toute objectivité le même constat que Noam Chomsky, quoi qu’on pense de Chomsky par ailleurs: le troisième et ultime avatar du totalitarisme après le stalinisme et l’hitlérisme, c’est la mondialisation néo-libérale qui se consacre toute entière à délibérément tuer l’âme des peuples, dont évidemment, “l’âme du peuple juif”, comme l’appelaient aussi bien le Rav Kook que Nicolas Berdiaev.
Partout, ou presque partout, les responsabilités traditionnellement dévolues à l’État sont de plus en plus assumées par les grandes corporations transnationales. En France, c’est à Mitterrand qu’on le doit. Progressivement, les institutions politiques se sont trouvées soumises à l’influence croissante de ce que Chomsky désigne comme de “vastes institutions de tyrannie privée”. Fortement hiérarchisées, ces entités exercent une influence considérable sur les décisions de l’État, tout en échappant aux mécanismes du contrôle démocratique. Or, c’est à ce niveau qu’on retrouve dès les années 1980 tout le personnel de Vichy et sa descendance, poursuivant les mêmes fins par d’autres moyens. Quand on lit que Hubert Védrine Conseil, société de “stratégie géopolitique”, estime urgent que la France “passe d’une méfiance stérile face à la mondialisation à un dynamisme offensif dans la mondialisation”, on est édifié sur son “socialisme”. L’État-nation devrait, selon les vœux des héritiers de Vichy, se muer en un État-corporation sous influence ennemie — mais n’était-ce pas le rêve, déjà, des pétainistes comme Louis Salleron sous l’Occupation nazie?
Un documentaire édifiant produit en 2016 par France Télévision, c’est-à-dire avec l’argent des contribuables, vient renforcer cette conviction: Mitterrand l’Américain. L’inéluctable Hubert Védrine y sème des commentaires qui ne laissent aucune place à l’ambiguïté: “Par réalisme, [Mitterrand] faisait partie de ceux qui, sous la IVe République, avaient jugé absolument nécessaire qu’il y ait une alliance avec les États-Unis. Il était dans ce courant atlantiste.” Par réalisme? Plutôt par opportunisme, comme le corrige Pierre Lurçat! Et cela ne nous apprend rien que nous ne sachions déjà depuis l’ouvrage éclairant de Lacroix-Riz, Les Elites françaises entre 1940 et 1944 — De la collaboration avec l’Allemagne à l’alliance américaine. Alors, la continuité du combat, pour les groupes cités dans L’Etoile et le poing, ne serait-elle pas dans un retour au modèle garibaldien, à la fois opposé au “socialisme” et à la mondialisation néolibérale? Arthur Koestler disait de Jabotinsky qu’il était “un Libéral national dans la grande tradition du 19e siècle.” Comme il est impossible d’être à la fois pour une chose et son contraire, les conclusions, en ce qui me concerne, sont faciles à tirer…
4. EPILOGUE: CHARLES DE GAULLE ET LES FILS DE L’IMPOSSIBLE — UN MALENTENDU TRAGIQUE
Je n’ai pu m’empêcher de ressentir, peut-être à tort? un anti-gaullisme diffus chez Pierre Lurçat. Il faut se méfier des impressions qui ne se justifient pas toujours.
En tout état de cause, il apparaît bien sûr que c’est au cours de la crise de 1967 que le général de Gaulle s’est aliéné une majorité de Français juifs à cause d’un malentendu majeur. Dans leurs études objectives de la situation, l’historien Serge Berstein ou Samy Cohen, politologue français spécialiste de l’histoire de la défense israélienne, ont exposé les véritables termes du contexte. Jusqu’en 1967, le général de Gaulle entretenait avec son homologue israélien des relations empreintes de cordialité. Il accueillit notamment David Ben Gourion avec chaleur lors de ses visites officielles en 1960 et 1961. Par ailleurs, sous son autorité, la France ne cessa d’apporter son soutien à l’État d’Israël en contribuant au renforcement de ses capacités de défense. Plusieurs accords permirent ainsi la livraison d’avions de chasse Mirage à Tel-Aviv — soixante-douze appareils furent remis en 1961 — , ce qui contribua de manière significative à la supériorité technologique de l’armée israélienne durant la guerre des Six Jours (5 au 10 juin 1967).
Le règlement de la crise algérienne en 1962 permit à la France de rétablir ses relations diplomatiques avec les États arabes et d’engager une coopération économique, notamment dans le cadre d’une géopolitique française centrée sur les enjeux pétroliers. Tandis que les pays arabes se montrent disposés à cette collaboration, Israël, fort de ses liens privilégiés avec les États-Unis, accorde peu de considération à l’influence française dans la région. Le général de Gaulle ambitionne pourtant d’endosser le rôle d’arbitre au Proche-Orient en misant sur une position de neutralité susceptible d’apaiser les tensions régionales.
En mai 1967, le président égyptien Gamal Abdel Nasser exige le retrait des forces onusiennes stationnées depuis 1956 à la frontière israélo-égyptienne, avant de décréter le blocus du golfe d’Akaba, ce qui revient à étouffer l’accès maritime du port israélien d’Eilat. À la mi-mai 1967, de Gaulle entreprend de dissuader l’ensemble des protagonistes de recourir à la force. Le 24 mai, il expose cette position au ministre israélien des Affaires étrangères, Abba Eban, puis, le 2 juin, au roi Fayçal d’Arabie saoudite, affirmant que toute partie initiant un conflit se verrait discréditée aux yeux de la communauté internationale [11]. Afin de manifester l’impartialité française, les ventes d’armes à destination du Proche-Orient sont suspendues pour une durée indéterminée.
Jusqu’au mois de novembre, de Gaulle s’efforce de jouer les médiateurs entre les parties en conflit. Il rappelle notamment à Alexis Kossyguine, le 1er juillet, que la résolution de la crise incombe aux cinq membres permanents du Conseil de sécurité des Nations Unies. Le refus, par Israël, d’appliquer la résolution 242 adoptée par le Conseil le 22 novembre 1967 — prévoyant notamment le retrait des territoires occupés — constitue, aux yeux du Général, un affront personnel. C’est dans ce contexte qu’il prononce, peu après, la célèbre déclaration, parfaitement malheureuse, évoquant le “peuple dominateur”. Cette petite colère d’un grand homme était, il faut bien le dire, stupide. Avec l’encouragement permanent des diffamateurs venimeux à la Mitterrand, elle a contribué à alimenter une légende absurde selon quoi de Gaulle était antisémite.
Aussi serait-il bon de tenir compte, à ce sujet, des propos de Romain Gary, grand écrivain français, fier de sa judaïté, d’ailleurs adoré des lecteurs israéliens, et néanmoins “gaulliste inconditionnel” suivant ses propres termes, quand il dit qu’il n’a pas mal réagi à la phrase de de Gaulle et qu’il confie, à propos du Général: “C’est un homme qui est totalement dépourvu de toute trace d’antisémitisme.” On ne peut certes pas en dire autant de Mitterrand, l’ami de Bousquet, qui parlait avec mépris des déportés du Vel’-d’Hiv’ comme de “gens qui ne sentent pas profondément ce que c’est que d’être français.”
Pour ne pas quitter immédiatement le domaine littéraire, cela va plus loin encore. De Gaulle avait pour Joseph Kessel et sa mystique de l’attachement charnel à Israël de l’admiration. L’illumination de Kessel date de son voyage de 1926 en Palestine. En 1948, l’auteur de L’Armée des ombres part couvrir pour France-Soir les premiers jours d’existence d’Israël. A cette occasion, il reçoit le premier visa de l’histoire de “l’Eretz”. En 1970, Jef Kessel publie un livre intitulé Les Fils de l’impossible, dans lequel il pose un regard intime et poétique sur la naissance de l’État d’Israël, en s’appuyant sur des témoignages de pionniers et de combattants juifs. Ce grand écrivain élu à l’Académie française en 1962 qui avait fait frapper son épée d’académicien d’un lion et d’une étoile de David, mais aussi, au plus près de la garde, de la croix de Lorraine, n’a pas pris ombrage de la phrase de de Gaulle sur le “peuple d’élite”. Il envoie au Général et lui dédicace affectueusement ses Fils de l’Impossible. La réponse est édifiante:
“6 juillet 1970
Mon cher Maître et ami,
Vous avez vu, vous faites voir ; vous avez senti, vous faites sentir ; vous avez compris, vous faites comprendre ; le tout simplement, directement, fortement. Telle est la marque de votre si grand talent. C’est celle-là que porte votre livre Les Fils de l’impossible. Je vous remercie de tout cœur de l’avoir écrit, à son tour, et des termes en lesquels vous me l’avez dédicacé.
Soyez assuré, je vous prie, mon cher Joseph Kessel, de mon amitié fidèle et dévouée.
C. de Gaulle”
Attaché à la cause sioniste, Joseph Kessel publie en quelques années Terre d’amour et de feu (1965), Israël que j’aime (1967) et Les Fils de l’impossible (1970), œuvres par lesquelles il cherche à retracer, à travers l’écriture, l’épopée du peuple juif revenu d’exil.
Cela m’amène à reconsidérer une autre injustice faite à de Gaulle. On raconte qu’il se serait exclamé avec dégoût en arrivant à Londres: “Je m’attendais à trouver la France des cathédrales, et c’est la France des synagogues qui est venue”. Cette phrase apocryphe me semble parfaitement fausse et l’attitude de de Gaulle est toute autre. Ce qu’il dit, c’est: “Je n’avais autour de moi que des Juifs lucides, quelques grands aristocrates, et les pêcheurs de l’île de Sein.” S’agit-il ici de paroles de mépris? C’est le contraire exactement: de Gaulle s’emporte contre son milieu, contre les bons bourgeois catholiques, cette France de “l’Ecole de guerre, de l’Académie et des prélats” dont il espérait qu’elle allait le rejoindre et qui se couche devant Vichy et les nazis. C’est avec la même gratitude qu’il accueillera Druon et Kessel par les mots: “Vous êtes de ces bons Français qui nous dictent notre devoir.” Mais, pour opposer les bons et les méchants, terme à terme, il existe une arithmétique plus simple encore. De Gaulle était à Londres, Mitterrand à Vichy.
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[1] Le Bné-Zeev a été constitué en 1968, à la suite des affrontements de Belleville où la préfecture de Paris avait été alertée par un informateur qu’un pillage des magasins juifs était planifié en représailles de la guerre des Six Jours à la date anniversaire du 5 juin. Les CRS envoyés par de Gaulle pour protéger les commerçants mirent fin aux échauffourées, mais la communauté de Belleville commença à craindre pour sa sécurité.
[2] Le Paris-Match de Prouvost avait déjà fait de l’intox anti-de Gaulle en 1958, quand des représentants de gauche (dont Mitterrand) avaient appelé à défiler pour la “défense de la République” (cette farce, déjà!) Malgré l’échec cuisant de cette manifestation spectrale, Paris-Match avait osé titrer: “L’appel des gauches : Paris répond en nombre et en silence”! Portrait: “Jean Prouvost, serviteur docile de Vichy qui n’est devenu plus réticent contre le gouvernement que dès le moment où la victoire de l’Axe a paru compromise, un de ces hommes qui ont un pied partout, se disait américanophile dans les conversations privées et était en relations avec l’ambassade des États-Unis. Laval avait d’emblée poussé l’ambassade d’Allemagne à préserver au mieux les intérêts de « M. Prouvost » en zone occupée, « insistant sur le fait que cet ami de Lord Beaverbrook avait l’oreille des Anglo-Américains ».” Annie Lacroix-Riz, Les Elites françaises entre 1940 et 1944: De la collaboration avec l’Allemagne à l’alliance américaine, Armand-Colin, 2016.
[3] Paul Racine, J’ai servi Pétain: Le dernier témoin, Le Cherche-Midi, Documents Histoire, 2014.
[4] Joseph Désert, Toute la vérité sur l’Affaire de la Cagoule, sa trahison, ses crimes, ses hommes, Paris, Librairie des Sciences et des Arts, 1946.
[5] Il s’est d’ailleurs produit, au cours des émeutes de 1968, deux événements extrêmement troublants. Le premier: l’archevêque de Paris, Marty, qui avait été proche de Charles Challiol (l’un des prélats français les plus compromis dans la collaboration), et qui s’était fait remarquer par des discours pro-Vichy en 1943, à Rieupeyroux, apporte bruyamment et de façon étonnamment intempestive son soutien aux casseurs. Le second événement n’est pas moins étonnant. Pompidou le relate dans ses mémoires parus à titre posthume, Pour rétablir une vérité: afin de mettre un frein immédiat aux émeutes, Pompidou demande à la préfecture de rediriger les casseurs vers les beaux quartiers. Il pense que son ordre a été suivi, puis constatera que la préfecture n’en a tenu aucun compte. Qu’en conclure? Premièrement que Pompidou savait très bien que les instigateurs des troubles n’étaient pas des “sionistes israéliens”, mais des pétainistes du 16e arrondissement, le fief de Jacques Isorni, député élu en 1951 avec pour seul programme la défense du gouvernement de Vichy. Deuxièmement, que la préfecture était à leurs ordres et non aux siens, le premier ministre de Charles de Gaulle.
[6] D’après Pochon, Pellay (qui est placé sur écoute téléphonique) est en revanche en contact avec Jean-Pierre Pierre-Bloch, de la LICRA, qui est un promoteur très actif des deux campagnes présidentielles de Mitterrand en 1973 et 1981.
[7] “Un Entretien avec Bernard Alapetite”, L’Evénement du jeudi, n° 657, 5–11 juin 1997: “Des liens essentiels ont toujours existé entre l’idéologie d’extrême droite et l’exploitation sexuelle des mineurs. Elle a été théorisée par Michael Kühnen (1956–1991), l’un des principaux leaders néonazis allemands de l’après-guerre. Selon lui, les homosexuels “actifs” constituent une élite destinée à former des confréries guerrières au service de la horde, tandis que les homosexuels “passifs” doivent être, selon l’antique loi germanique, noyés dans les marais. Par ailleurs Kühnen s’est livré à une réécriture de l’histoire de l’hitlérisme. Selon lui, l’échec du Reich serait imputable à l’erreur de Hitler d’avoir brisé l’équilibre entre SA et SS en éliminant les premiers sous la pression de l’aristocratie militaire.”
[8] Presbytère de Glencross où est officiellement domicilié Hubert Védrine, comme le révèlera le journal L’Humanité (“L’enquête sulfureuse de Bernard Violet sur l’assassinat du pasteur Doucé”, L’Humanité, 18 mai 1994). Dans Récidives (2004), BHL raconte qu’il déjeune avec Hubert Védrine qui pleurniche à propos de la “vilaine affaire Habache”, laquelle, du reste, ne semble pas autrement troubler notre BHL. Douze ans plus tard, alors que tout le monde autour de Mitterrand savait très bien — quelques heures seulement après l’explosion de la bombe — que le FPLP était responsable de l’attentat, BHL semble étrangement indifférent à la venue de Georges Habache, le fondateur du FPLP. D’ailleurs, abordant un autre sujet deux ou trois lignes plus loin, BHL se félicite qu’on réédite Drieu la Rochelle. Curieux homme qui voit l’antisémitisme où il n’est pas, mais non là où il est. La symbiose avec Mitterrand ne pouvait que réussir. Toutefois, c’est par un autre côté encore que ce passage surprend; on y apprend en effet que Védrine, connu par ailleurs pour ses positions “anti-humanistes” et “inégalitaires”, est fou d’occultisme. La résonance est inquiétante quand on a en tête, précisément, les relations étroites qu’entretiennent les Védrine père et fils avec le pédocriminel Nicholas Glencross, très lié au néo-nazi de la FANE Michel Caignet, promoteur — via la revue Gaie France et le réseau Toro Bravo — de cérémonies pédophiles à rituels “lucifériens” (sic).
[9] Jean-Edern Hallier, L’Honneur perdu de François Mitterrand, Monaco / Paris, Éditions du Rocher / Les Belles Lettres , 1996.
[10] Le colonel Francis Masset, que j’ai connu pour l’excellente raison que nous étions immédiatement voisins et qu’il organisait régulièrement des cérémonies commémoratives à Darnétal, était un homme étonnant, un authentique héros, gaulliste de la première heure, qui ne transigeait pas avec la morale et détestait tout particulièrement les résistants à retardement, ces usurpateurs du sacrifice des autres qui s’étaient comportés sous l’Occupation comme d’authentiques criminels. Il s’était vigoureusement élevé contre l’imposture du RNPG mitterrandien.
[11] Le manque de lucidité était ici flagrant. Un pays minuscule isolé au milieu de puissances hostiles ne pouvait se sauver d’une agression imminente et qui s’annonçait impitoyable qu’en prenant l’initiative de l’attaque. C’est pourquoi Israël a très tôt adopté la doctrine de l’offensive préventive telle qu’elle est résumée dans un verset du Talmud: “Si quelqu’un vient pour te tuer, lève-toi et tue-le le premier”.
Date de dernière mise à jour : 30/05/2025